Thursday, May 08, 2008

Plaine-des-Papayes accueille le 2e Salon d’été


L'Express. Article publié le Dimanche 20 avril 2008.

Une soixante d’œuvres artistiques dûment sélectionnées attend les amateurs d’art à Plaine-des-Papayes, dans le cadre du deuxième Salon d’été. Un millésime inoubliable…

Diversité des différentes écoles et tendances artistiques imprègnent les oeuvres exposées jusqu’au 30 avril au complexe administratif de Plaine-des-Papayes.
Diversité des différentes écoles et tendances artistiques imprègnent les oeuvres exposées jusqu’au 30 avril au complexe administratif de Plaine-des-Papayes.
L’an passé, les responsables de la Galerie d’Art nationale (GAN), Thivynaidoo Pernumal Naiken en tête, donnaient rendez-vous aux amateurs des Beaux-Arts, à la nouvelle galerie municipale de Quatre-Bornes, pour son premier Salon d’été. Un an après, ils nous convient de nouveau, mais cette fois-ci à la Plaine-des-Papayes, après avoir obtenu, à cet effet, la précieuse collaboration du conseil des districts du Nord.

Le vernissage du 2e Salon d’été a eu lieu jeudi après-midi et depuis vendredi, les visiteurs défilent devant la soixante d’œuvres artistiques dûment sélectionnées. L’exposition restera ouverte jusqu’au mercredi 30 avril. Elle a lieu dans le nouveau complexe administratif de Plaine-des-Papayes.


Original et révolutionnaire

La tenue d’une telle exposition, au cœur de nos deux districts nordistes, fournit une occasion privilégiée, aux habitants des Pamplemousses et de Rivière-du-Rempart, de se familiariser avec une partie de ce que notre île Maurice peut produire en matière d’œuvres artistiques. La meilleure façon de féliciter la direction de la GAN, pour sa politique d’ouverture et de démocratisation de l’accès du plus grand nombre à nos potentialités esthétiques, est encore d’encourager le plus de monde possible à se rendre sur place et à prendre le temps d’admirer les œuvres exposées.

Comme son nom l’indique, ce Salon d’été regroupe une soixantaine d’œuvres d’autant d’artistes, dont principalement des peintres. Ils utilisent toutefois un vaste choix de techniques et de matériaux divers. C’est dire que d’une toile à l’autre, le visiteur bascule d’une conception esthétique à une autre. Le fruit du travail et des recherches esthétiques d’un nombre plus limité de sculpteurs, de photographes, de dessinateurs, de graphistes, de scénographes mêmes, serait-on tenté de souligner, ajoute encore à la diversité des différentes écoles et tendances artistiques présentes à cette exposition.

Devant un si vaste échantillon de ce nouvel état des lieux de l’expression artistique à Maurice, le critique d’art ne peut que se limiter à souligner ce qui lui apparaît comme le plus original et peut-être même le plus révolutionnaire dans les différentes démarches manifestées dans le cadre de ce 2e Salon d’été de la GAN. Manifestement, la palme de l’originalité revient au Trou d’Argent du Rodriguais James Castel. Il contraint le contemplateur de son œuvre à observer, vu du ciel, le Trou d’Argent de son île hors temps.


Une résurrection de Modigliani

Ce faisant, il excelle dans la confrontation de la force océanique, la houle océane, persistant, depuis des millénaires, à rogner son île en élargissant sans cesse le bassin nautique, gagné sur la falaise basaltique, ou encore sur le lit de sable d’or ou d’argent, ourlant la rive. Castel donne un nouveau dynamisme esthétique à cette confrontation naturelle. Les embruns, que celle-ci projette, sont faits de puissantes couleurs et nous en mettent plein la vue. Une réussite qui fait plaisir, car elle va au-delà de l’expression visuelle.

L’on ne sait qui du photographe ou du graphiste, nous devons féliciter en la personne de Steeve Dubois. Il nous offre le visage déterminé d’un Mauricien. Laissons à nos experts en communalisme, scientifique ou pas, le soin de déterminer sa race ou encore sa sous-caste. Contentons-nous de l’admirer, ainsi multiplié et émergeant ainsi de nos quatre couleurs nationales, qu’on pourrait presque prendre pour un beau morceau de paltot larkensiel. Cette réussite constitue une belle affiche, vantant notre unité nationale.

Gérard Foy récidive avec ses récupérations géniales de vieilles portes et de vieilles fenêtres, retrouvées dans le trésor de nos chantiers de bois de démolition. Un de nos plus beaux livres d’histoire. Son trait de génie est, cette fois-ci, de retenir, comme par enchantement, ses deux portes en déséquilibre, avec la seule dentelle de deux lambrequins complètement rouillés. Tout le reste est chef-d’œuvre.

Le sculpteur Devanand Bungshee nous invite à porter un regard attentif sur le mystère de tout être humain. Deux masses ovales, sinon ovoïdales, perchées au sommet d’une colonne vertébrale et l’on parvient à une résurrection de Modigliani, nous rappelant que toute réussite artistique est affaire de Transfiguration.

Dev Anand Chooramun vêt de riches oripeaux notre dodo national, également mais joliment transfiguré. Kishore Bodho s’inspire de l’ami Georges (Brassens), en faisant, de quelques pétales séchés de bougainvillea, un cotillon avec ondine faisant trempette, à moins qu’il ne s’agisse d’une nymphe sortant de l’onde.

Jean Yves L’Onflé donne de l’épaisseur à sa nature florale recréée sur toile, en la parsemant de minuscules points blancs. On songe à une plante de pied, emblématiquement réussie, en admirant la sculpture de Dhyaneshwar Dausoa. Des orteils apparents font figure de cierges adorateurs. Le titre We are one nous désoriente en direction des cinq doigts séparés d’une commune main, travaillant si bien à l’accomplissement de tant de chefs-d’œuvre quotidiens et dans tant de secteurs différents. Il y a du Michel-Ange des Esclaves enchaînés dans l’œuvre photographique ou presque de Rikesh Boodhun.

D’autres artistes occupent une place prééminente, au sein de ce 2e Salon d’été, même s’ils ont davantage cherché à se montrer dignes de la réputation qu’ils ont légitimement acquise, au fil des ans, au lieu de chercher à nous surprendre, à nous étonner, bref à nous éblouir davantage.


Promesses et couleurs nationales

C’est du moins ce qui ressort à coup sûr du sous-bois avec rivière de Belle-Isle, Trou-d’Eau-Douce, d’Yves David, de la Clarisse House pleine d’allant de Yeshan Gunnoo, des filaos dénudés de Calodyne essayant de nous protéger d’un ciel bleuté mais flamboyant d’une apocalyptique beauté de Véronique Le Clézio, d’un jardin des Pamplemousses recréé par le coloriste chazalien que demeure Saïd Aniff Hossanee, de l’icône slave des Salines de Tamarin de Jean Claude Baissac, ou encore des visages féminins afro-indiens de Nathalie Périchon

Les amateurs de Beaux Arts seront d’accord pour souligner toutes les promesses contenues dans le Canard sauvage sculpté sur bois de Nehrullah Gungah, dans la Femme porteuse de beauté d’Amrita Auckloo Dyalah, dans les Femmes au champ de Crèvecoeur de Kishan Jagunduth Beejadhur, dans la Rue Ricard, esthétiquement décomposée, de Jacques Désiré Wong So, ou encore dans le ratissage aux couleurs nationales mais finement dessiné de Geeta Mohit-Pusun. Tout cela fait du 2e Salon d’été de Thivynaidoo Pernumal Naiken, à Plaine-des-Papayes, un millésime inoubliable.

Yvan MARTIAL

1 comment:

myramir said...

James Castel
Je ne crois pas avoir vu "trou d'argent"
Si tu ne l'as pas vendu, je pourrai l'admirer chez les "J"
Prends tu tes propres tableaux en photos avant de les quitter ?
Ce que je souhaite c'est qu'on ne fasse pas de ce beau site , Trou d'Argent une piste de Quad :-(
Les espaces et sites naturels sont irrempla�ables, pr�servons les.
Ils valent plus que l'Argent, de l'Or!